Reims-Deux Acren

Jeudi 17 juillet 2008

Toujours pas de réveil. Du coup, je me réveille à 10h. C'est hyper tard pour faire 190 bornes. Je me dépêche de monter sur mon vélo, quelques courses pour manger et finalement, un peu après midi, je quitte Reims. Je ne sais toujours pas si je vais arriver à Deux Acren (chez, entre autre, Olivier, le batteur chanteur de René Binamé (www.aredje.net) )le jour même, ou si je vais devoir planter ma tente, épuisé.
Alors qu'il faisait beau à Reims, le temps se couvre. Pourvu qu'il ne pleuve pas...

J'avance, petit à petit, kilomètre après kilomètre. Je n'ai pas l'heure. En fait, je n'ai pas vraiment la notion du temps. J'ai décidé de le faire et, au fond de moi, j'essaye de me persuader que je vais y arriver. J'ai bien fait 200 bornes le premier jour, pourquoi ça ne serait pas possible aujourd'hui ? Et puis je pédale en écoutant de la musique, et en me disant que c'est la meilleure chose à faire. J'avance, et je verrais plus tard...




Je croise plusieurs petits lapins, effrayés par ce étrange deux roues silencieux.

A un moment donné, malgré les barres de céréales et les gâteaux que j'ingurgite régulièrement, j'ai faim, et puis pour la troisième fois depuis mon départ de Reims, mes bidons sont presque vides.

Je m'arrête à un village (Clairfontaine) pour prendre de l'eau, l'horloge du clocher indique 18h30... Un peu plus loin, je m'arrête à l'orée d'un bois pour manger. Mon pain acheté le matin y passe, avec la terrine végétarienne qui traînait dans mes sacoches. Quelques fruits, et c'est reparti...





J'ai remarqué un changement progressif, mais sensible dans l'architecture, au fur et à mesure que je monte au nord durant cette étape ; la brique remplace le béton, et les toits se font plus pentus. Le genres de choses qu'on ne voit pas quand on se déplace en avion, en train, ou sur les autoroutes. C'est aussi pour ce genre de détails que pour rien au monde, dans la mesure où j'en suis capable, je prendrais mon vélo, pour traverser la rue, la ville, ou le monde...

J'arrive à Etroeugnt, je demande ma route à une jeune femme. Elle m'indique et me demande : «Puis-je vous poser quelques questions ? En fait je travaille pour le journal local. » J'accepte. J'imagine en souriant, l'article, au milieu de la liste des décès et du résultat du concours de pétanque... Je ne lui ai même pas demandé le nom du journal (Si par hasard, chère journaliste, tu lis ces lignes, je veux bien recevoir une copie de l'article en question...)
Il est tard et il me reste encore beaucoup de kilomètres jusqu'à Deux Acren.
Mon itinéraire me fait quitter les départementales pour prendre les voies communales, le genre de routes qui traverse les trous du cul du monde, avec de l'herbe qui pousse au milieu. C'est magnifique. Je regrette de n'avoir pas le temps de m'arrêter prendre quelques photos.

C'est le soir. Discrètement, la nuit tombe. Je fatigue aussi un peu. J'envisage de m'arrêter. Je continue en cherchant vaguement un endroit pour passer la nuit. Et puis il se met à pleuvoir. Pas génial de planter sa tente sur un sol humide... Du coup, je cherche un abri, mais je continue d'avancer... quand finalement quelques kilomètres avant la frontière, je trouve une maison. L'envie d'en faire la mienne pour la nuit me prend et je m'arrête. Ça me rappelle les scénarios de films d'horreur : une maison bourgeoise vide, un voyageur seul un soir d'orage... J'ai terriblement envie de rester là, l'endroit me plaît. Mais c'est tellement salle et en mauvais état que je me contente de prendre des photos, avant de reprendre la route, encore un fois.






Ça y est, c'est décidé, quitte à arriver dans la nuit, je ne m'arrêterais pas avant Deux Acren.

Quand je passe la frontière, un cri de joie m'échappe. Ça y est ! J'ai quitté la France ! Il fait nuit, c'est beau.

Je me demande bien à quelle heure je vais arriver. Je suis pressé. J'ai surtout peur de déranger mes hôtes, des les réveiller au milieu de la nuit. De toute façon, je n'ai plus le choix, alors je pédale...

J'arrive à Dour. Je trouve une route barrée. Ça m'intrigue un peu, mais je passe... C'est en voyant le nombre de personnes qui vont dans cette direction, et puis quand j'entends vaguement de la musique au loin, que je me rends compte que c'est le festival de Dour. D'ailleurs, quand plus loin, je demande ma route, on m'indique le festival avant même d'avoir cherché à comprendre où je veux aller...
C'est loin d'être évident de trouver sa route, en Belgique. Souvent, le nom des routes n'est pas indiqué, pensant que la direction suffit. Moi, en vélo, la nuit, fatigué et sous la pluie, ça ne me suffit pas. Je me perds...
Je me retrouve à un moment donné sur une bretelle d'autoroute, rien n'indiquant que c'est une route interdite aux vélos.
Finalement je finis par trouver Baudour, puis Chièvres, Lessines et Deux Acren. Vous ne pouvez pas imaginer le bonheurs que me procure le seul fait de savoir que je roule sue la bonne route, et pas en train de me perdre une fois de plus. Plus les kilomètres passent, plus je m'aperçois que j'avais sous estimé la distance à parcourir en Belgique. Mais je vais vite. Étrangement puisque je devrais être exténué, mais non. Je ne sens plus rien. Comme si l'envie d'arriver m'avait donné des ailes. Pédaler est devenu un réflexe qui ne me demande plus d'effort. Et je trace, dans la nuit, en espérant qu'il n'est pas trop tard...


Lessines... Et puis Deux Acren, enfin. Un nouveau cri de joie. Le cri du coeur, celui du vainqueur de l'étape. Le cri de la victoire sur la résignation. Un cri de fierté peut être aussi quelque part. Je l'ai fait ! Seul ! Sans autre soutien que ma détermination. C'est possible... La preuve... Encore faut-il retrouver la maison. Je n'ai pas l'adresse, juste quelques souvenirs de l'année précédente. La première rue à droite en face de l'église. Quand j'y arrive finalement, l'exactitude de mes souvenirs est confirmée. Je suis heureux. Épuisé, mais heureux...

J'ai vu sur le clocher de l'église qu'il est une heure du matin. Il n'y a pas de lumière dans le bâtiment, ni de sonnette. Je frappe, je siffle, en vain... Je n'insiste pas de peur de réveiller et déranger les habitants ; et décide de chercher, plutôt, un endroit où m'installer. Je trouve un porche, bien abrité du vent et de la pluie, un plancher, un matelas...

1 comment:

Anonymous said...

aarf c'est vache le coup des potes qui sont pas la, apres toute cette route !
La photo du champ avec le barbelé au 1er plan est vraiment spécial, elle a un coté tres fantastique, limite psyché.
marrant.