Odense

Samedi 23 Août

Après une dernière nuit chez Bence, je pars... sous la pluie, en espérant que ça va se calmer... Tu parles...
A Roskilde, je retrouve ces indications pour les vélos. A un carrefour, je trouve un panneau : Ringsted 32km, et un autre pour les vélos : 35,5km. Je suppose que ça doit valoir le coup de faire 3km de plus et d'emprunter des routes plus agréables plutôt que de suivre bêtement la route principale. Ma faible experience avec les itinéraires cyclables danois a été plutôt positive et je décide de suivre l'itinéraire pour vélo.
Tout va bien... les premiers kilomètres... Quand tout à coup je me retrouve a devoir m'engager, au milieu de la campagne, un chemin boueux. J'espère qu'il y en a pas des kilomètres, et je continue...
Je tombe sur des menhirs, c'est joli, mais sous ces trombes d'eau, j'ai vraiment pas envie de faire du tourisme dans les chemins mon vélo de 50kg équipé de pneus route s'enfonce comme dans du beurre tiède...

500 mètres plus loin, je retrouve avec plaisir le bitume dur et lisse. J'avance. Je longe une propriété bourgeoise avec manoir et terrain de golf. Et puis ces indications bleues me dirigent a nouveaux sur des chemins...
Je n'ai aucune idée de je suis, je n'ai pas le choix, alors j'y vais. C'est mou, je m'enlise profondément, parfois je traverse des flaques démesurées et sous ma cape de plastique, à force d'éclaboussures, je suis humide. Mes rangers se remplissent d'eau froide. Chaque flaque a droit à son juron. Ces chemins sont accidentés et vallonnés (je ne fais que monter et descendre), je traverse bois et champs. La boue et le sable recouvrent maintenant mes jambes et commencent à remplir mes chaussures. Alors qu'avec un VTT sous le soleil -si rare au Danemark- cet itinéraire doit être merveilleusement agréable, moi, pressé d'arriver à Odense, ne sachant toujours pas comment je vais traverser le pont (entre l'île de Copenhague et celle d'Odense) et pensant aux 120km qu'il me reste à pédaler, j'ai plutôt la sensation de vivre l'enfer. C'est décidé, je ne suivrais plus jamais les indications cyclistes dans ce foutu pays.
Je trouve le bitume à nouveau. J'entre dans un village, je rejoins même une route qui existe sur ma carte au 500 000ème(sur laquelle évidemment il n'y a pas le village je me trouve, mais avec l'aide des panneaux a un carrefour, j'arrive a me repérer approximativement).

Alors que j'ai déjà fait plus de 20km, Ringsted est encore a plus de 30km. J'ai comme l'impression qu'on s'est moqué de moi, me nerf fragilisés par la difficulté. Il ne m'en faudrait pas beaucoup plus pour péter les plombs. Je ne suis pas du tout sur la route que j'avais prévu et de je suis, j'ai tout intérêt à suivre un autre itinéraire. J'abandonne donc à la fois celui qu'indiquent ces maudits panneaux bleus et celui tracé sur la carte. Je vais tenter le plus court en direction d'Odense ; cohérent, non ?
La pluie ne s'arrête pas. Ma carte, humide, se déchire aux pliures ; sur le sol, la couche d'eau ne fait qu'épaissir. Je continue en décidant de m'arrêter dans la prochaine ville pour manger et me renseigner quant à comment traverser ce pont. Et puis rester un sec un moment. A chaque fois que j'appuie sur mes pédales, j'ai l'impression de marcher pieds nus dans une profonde flaque. J'ai froid.
Les rues de Slagelse sont désertes... Je trouve la gare et malgré le tarif élevé du billet, je monte dans un train pour Odense. Ça fait 6h que j'affronte l'enfer, seul. Mon combat est vain. Mon entêtement a des limites. Il ne serait pas raisonnable de tenter de traverser le pont en stop avec mon vélo, au risque d'attendre des heures sous la pluie battante. Il est temps que le calvaire s'arrête.
Une demi heure plus tard, je mange mes spaghettis froids, pieds nus, au sec dans le wagon numéro 13, qui ne va pas tarder à traverser la mer. Pour la première fois de ma vie, je traverse la mer en train, non pas sous l'eau, comme pour traverser la manche, mais bien sur un pont, de plus de 20km. Par les fenêtres, partout, il n'y a que l'eau à perte de vue, tristement grise et qui se confond avec le ciel. La mer, les nuages et la pluie, incessante... C'est déprimant.
J'ai posé mon vélo contre un autre. Il doit se sentir un peu honteux devant la belle monture noire et élancée. Malgré ses jantes fines et ses pneus fins, cet autre vélo porte lui aussi des sacoches, à l'arrière et à l'avant. Son propriétaire, à côté de moi, lit un livre. A priori moins con que moi, il a décidé de ne pas pédaler aujourd'hui. Il vient un moment il me demande d'où je viens, et après ma réponse me dit : "On peut parler en français alors". Xavier vient de Genève. Il est parti il y a une semaine de Bruxelles, a fait à peu près le même chemin que moi, mais se déplace en train depuis Hambourg. Comme moi, il fuit Copenhague. On discute et on a, bien sûr, un bon terrain d'entente. A la gare d'Odense il rate sa correspondance. On a donc le temps de prendre un café et de discuter, de faire connaissance. Ça fait plaisir. Je suis même content, du coup, d'avoir pris le train.

Un quart d'heure après le coup de film a mon hôte, son colocataire Jacob vient me récuperer. Une maison sympatique de 2 étages, ils vivent au 2ème, en dessous il y a d'autres gens.
En début de soirée, on apprends le lieu, jusqu'ici tenu secret se déroule la Pirate Party. C'est une fête qui se déroule dans un lieu squatté pour l'occasion.
On y va en vélo, toujours sous la pluie. Ça devient une habitude...
C'est un hangar abandonné de l'école technique. Il n'y a pas de voisins. L'entrée se fait par la fenêtre. A l'intérieur, tout est prêt. Banderoles antifascistes, sound system, lumières et même machine a fumée. Il ne manque que la boule a facettes. Je bois ma bouteille de soda, en discutant avec des gens qui parfois refusent de croire que je viens de France en vélo.
C'est plutôt chouette comme entrée en matière dans cette ville...

4 comments:

Anonymous said...

La pluie en vélo dans les chemins de campagne c'est hardos
Noptek

Anonymous said...

J'arrive au bout de ton récit... c'est génial tout ce que tu as traversé depuis la dernière fois que je t'ai vu ! Tu le racontes avec des phrases qui glissent bien, ton style est plutôt bon, c'est agréable de lire tes aventures, moi en tout cas j'apprécie... ça m'a fait plaisir de prendre de tes nouvelles. Les photos sont belles. Je compte sur toi pour en prendre encore beaucoup... En tout cas j'espère que tu te portes toujours bien à ce jour, bon courage pour la suite!
... Et tes ratatouilles me manquent. Voilà.
Chloé

bikepunk said...

chloe, qui est tu ? fifi ?

Anonymous said...

courage tout ptit punk..
j'te soutiens moralement..
toujours..

I'll miss you..